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Page:Sue - Martin l'enfant trouvé.djvu/370

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effrayantes qui parlent de sang jeune et généreux, infibulé dans la veine épuisée de quelques vieillards exténués de débauches.

— Je te disais bien, moi, qu’il fallait du sang ! — s’écria le braconnier avec un accent de farouche triomphe.

— Non, Claude, il ne fallut pas de sang ; mais cette sanglante et mensongère histoire mit le savant sur la voie d’une admirable idée… Des tentures de soie et d’or, imprégnées de funestes parfums, couvraient les murs de cette opulente demeure et la tenaient dans une demi-obscurité. Ces tentures sont arrachées, le soleil bienfaisant pénètre de toutes parts, et bientôt, par les ordres du savant, les murailles disparaissent sous des masses de rameaux verts, fraîche dépouille d’arbres résineux et balsamiques, exhalant en abondance ces gaz qui rendent seuls l’air viable et pur ; puis des nourrices jeunes, saines, robustes, viennent tour-à-tour tendre leur mamelle féconde à la bouche expirante du moribond. Ô prodige ! à peine ses lèvres desséchées ont-elles été humectées de ce lait régénérateur, à peine a-t-il aspiré l’air vivifiant et salubre exhalé par les frais rameaux dont sa couche est ombragée, que le malade semble renaître, qu’il renaît ! son sang, appauvri, corrompu, se renouvelle, se régénère ; il est sauvé, il vit… il vit… et son salut n’a coûté ni larmes, ni sang… Un lait pur et nourricier, quelques frais rameaux d’arbres verts… les rayons bienfaisants du soleil, tels ont été les instruments de cette cure merveilleuse[1], Claude ; il en sera

  1. L’on excusera peut-être l’orgueil filial de celui qui écrit ces lignes, s’il dit que cette cure merveilleuse a été accomplie