Aller au contenu

Page:Sue - Mathilde, tome 1.djvu/240

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

ques minutes après, au milieu d’un nouveau repos de valse, elle dit tout haut à Ursule :

— Mon Dieu ! ma pauvre enfant ! n’ayez donc pas l’air si sérieux, si mélancolique, soyez donc un peu de votre âge si vous pouvez : qu’est-ce que c’est que cette sauvagerie-là ?

Ces mots de ma tante aussi entendus, répétés, commentés, établirent positivement que j’étais aussi moqueuse, aussi étourdie que ma cousine était timide, sensée, réfléchie.

Le monde revient bien rarement de ses premières impressions ; ces quelques mots de ma tante eurent donc une grande influence sur ma destinée.

Hélas ! il faut tout dire, mon inexpérience, ma vanité, augmentèrent encore la portée du mal qu’on me faisait… Plus tard, je déplorai amèrement cette réputation de méchanceté moqueuse. J’eus d’abord assez de faiblesse pour en être presque flattée, presque fière. Je me croyais belle, je pensais que l’ironie était un brevet d’esprit.

La valse finie, M. de Versac s’approcha de ma tante avec son neveu, M. le vicomte Gontran de Lancry.