Page:Sue - Mathilde, tome 2.djvu/203

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— Vous voilà, mon Dieu ! vous voilà ! Ne vous est-il rien arrivé ? — m’écriai-je d’une voix défaillante, en lui prenant les mains.

— Rien, rien, mais passons chez vous, — me dit M. de Lancry, en me montrant son valet de chambre d’un coup-d’œil irrité.

Je compris le peu de convenance de cette scène devant nos gens ; mais mon premier mouvement avait été tout irréfléchi.

Je craignis d’avoir contrarié Gontran, mon cœur se serra lorsque je fus seule avec lui. Alors seulement je remarquai qu’il était très pâle, très défait.

— Mon Dieu ! Gontran, que vous est-il arrivé ? — m’écriai-je.

— Et que vouliez-vous qu’il m’arrivât ? Êtes-vous folle ! Tout cela n’est-il pas naturel, très naturel ? — ajouta-t-il d’un air qui me parut presque égaré, et en riant d’un rire sardonique qui m’épouvanta. — Quoi de plus simple ? J’ai retrouvé le meilleur de mes amis, le tigre que j’ai dompté, vous savez… Je vous présente ce cher Lugarto ; il vous trouve charmante ; vous le traitez avec le dernier mépris… Il va chez votre tante, qui l’accable des plus sanglantes