Page:Sue - Mathilde, tome 5.djvu/8

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Je n’avais à me reprocher que l’exagération de quelques généreuses qualités ; je l’avais dit à M. de Lancry, je reconnaissais moi-même que mes douleurs passées ne pouvaient me gagner aucune sympathie, en admettant que le monde les eût connues, car j’avais manqué d’énergie, de dignité dans ma conduite avec lui.

Je m’étais toujours aveuglément soumise, lâchement résignée, je n’avais su que pleurer, que souffrir… et la souffrance n’est pas plus une vertu que les larmes ne sont un langage.

Souffrir pour une noble cause, cela est grand et beau. Humblement endurer le mépris et les outrages d’un être indigne, c’est une honteuse faiblesse qui excitera peut-être une froide pitié, jamais un touchant intérêt.

Cette découverte fut pour moi une terrible leçon : je reconnus qu’après tant de maux, j’avais à peine le droit d’être plainte ; la réflexion, l’expérience me prouvèrent qu’au point de vue du monde ou plutôt du plus grand nombre des hommes, Ursule, avec ses vices et avec ses provocantes séductions, devait plaire peut-être, tandis que moi je ne pouvais pré-