Page:Sue - Mathilde, tome 6.djvu/221

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— Ah ! Ursule… que vous avez fait de mal… à vous… et aux autres !

— Oui… mais depuis, moi aussi… j’ai bien souffert… Oh ! si vous saviez… lorsqu’il est venu aux deux rendez-vous que je lui avais donnés pour lui parler de vous… avec quel dédain… avec quelle aversion… il m’a d’abord accueillie ! Moi, pour me rehausser un peu à ses yeux, en lui montrant l’influence qu’il exerçait déjà sur mon cœur, j’ai voulu lui dire… toutes les hautes inspirations que je lui devais… j’ai voulu lui prouver que, grâce à lui, je devenais digne de comprendre tous les sentiments purs, vertueux… Malheur à moi… malheur à moi… les paroles m’ont manqué : c’est à peine si j’ai pu exprimer les nouvelles et nobles idées qui se développaient rapidement en moi… Dans mon trouble, dans mon effroi, dans mon enivrement… moi… toujours si hardie… j’hésitais… je balbutiais… Un mot… un regard de lui, qui eussent approuvé le changement qui se manifestait en moi, m’auraient encouragée… il aurait pu lire dans mon âme qu’il remplissait… qu’il transformait… Mais il me glaçait par son air ironique