Page:Sue - Mathilde, tome 6.djvu/78

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Oh ! comme j’étais fière de cet amour, de cette perle de mon cœur, conservée sans souillure… Si quelquefois je me sentais faiblir dans ma résolution, je me souvenais de ces paroles que Dieu m’avait inspirées au chevet d’Emma mourante : s’il savait !

Oui, je me disais : Que demain je révèle tout à M. de Rochegune, ne sera-t-il pas à mes pieds ! son amour ne reviendra-t-il pas plus passionné que jamais !

Pourtant, comme je le chérissais toujours et plus que jamais, j’avais des moments d’abattement cruel, d’affreux désespoir…

Alors je me souvenais de ce que m’avait encore dit la voix divine pendant cette nuit fatale… Courage… pauvre femme… tu ne sais pas ce que c’est d’avoir acquis, à force de sacrifices, le droit de pleurer sur soi… Et en effet je trouvais dans ces larmes une triste volupté !

Et puis enfin, — me disais-je, — si je réussis dans mes projets, une fois le bonheur d’Emma bien assuré, car M. de Rochegune ne restera pas insensible à cet amour si vif et si ingénu, et l’appréciera en le partageant, qui m’empê-