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Page:Sue - Paula Monti, tome 1, 1845.djvu/119

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— Ce n’est pas tout encore : le temps que tu as passé ici pendant que ton mari était en Italie m’avait rendu notre nouvelle séparation plus pénible encore ; c’était te perdre une seconde fois.

— Mais, mon père…

— Je sais ce que tu vas me dire… aux premiers jours de ton mariage, Brévannes m’avait offert un petit appartement dans sa maison… Bien souvent depuis tu étais revenue sur cette proposition… je t’avais constamment refusée…

— Hélas ! oui.

— C’est que, vois-tu, je doutais de Brévannes ; je doutais de la durée de cet amour, d’abord si violent… Je n’aurais pu être tranquille spectateur de tes chagrins ; ma défiance même aurait troublé ton ménage. Je me suis donc imposé un rigoureux devoir… je me suis dit : J’attendrai… Berthe ne m’a jamais menti… Si, après quatre années de mariage, elle est aussi heureuse qu’elle le dit, je verrai là une garantie certaine pour l’avenir et une preuve de la bonté du cœur de Brévannes. Ce moment est arrivé. Ton mari est digne de toi ; aujourd’hui je lui dirai : J’ai douté de vous, j’ai eu tort… je vous en demande pardon… Maintenant j’ai foi et confiance en vous… j’accepte l’offre que vous m’avez faite… je ne vous quitterai plus, ni vous ni Berthe.

— Tu dis, père ? — s’écria Berthe.

— Je dis, mon enfant chérie, que je n’ai plus assez d’années à vivre pour les passer loin de toi… Ma foi, je me laisse être heureux tout à mon aise ;