Page:Sue - Paula Monti, tome 1, 1845.djvu/57

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s’étaient transformées en désirs effrénés, en orgueilleuse irritation.

Il résumait amèrement et brutalement la question en disant :

« J’ai mis dans ma tête que cette fille serait à moi… Coûte que coûte, elle sera à moi. »

Courroucé de ne pas recevoir de lettres de Berthe depuis six semaines qu’il l’avait quittée, M. de Brévannes rompit brusquement avec madame Beauvoisis, l’idole de la saison des eaux de Dieppe, et revint s’enterrer dans l’île Saint-Louis. Lorsqu’il arriva, Berthe se mourait ; elle n’avait pu résister à tant de chagrins…

Presque touché de cette preuve d’amour, voulant d’ailleurs à tout prix que cette jeune fille fût à lui, M. de Brévannes, malgré ses résolutions de ne jamais faire un mariage de dupe, comme il disait, alla trouver Pierre Raimond, et lui demanda formellement la main de sa fille, s’attendant à une explosion de reconnaissance de la part du vieux graveur.

Chose incroyable, inouïe, exorbitante, qui renversa toutes les idées de M. de Brévannes, Pierre Raimond ne voulut pas consentir à cette union.

« M. de Brévannes était né riche, Berthe était née pauvre, il n’y avait entre eux aucune sympathie de classe, aucune convenance de position, aucuns rapports d’habitude, d’éducation, de principes ; partant, aucune garantie de bonheur pour l’avenir. »