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Page:Sue - Paula Monti, tome 1, 1845.djvu/90

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cueil fut glacial ; mais cet homme se montra bientôt si insinuant, si flatteur, il prouva si clairement à ma tante de quelle utilité il pouvait lui être pour le gain de son procès, qu’elle le pria instamment de revenir. En s’en allant il me jeta un regard significatif… Il n’avait tant fait que pour se rapprocher de moi.

Je fis part à ma tante de mes soupçons ; elle me répondit que j’étais folle… qu’il fallait se servir de la bonne volonté de M. de Brévannes, puisqu’il pouvait nous être si utile… Tu le sais, ma tante avait été très belle, elle n’avait pas quarante ans. M. de Brévannes s’aperçut un jour qu’elle prenait au sérieux quelques galanteries qu’il lui adressait par plaisanterie. Il redoubla de soins, bientôt elle ne put se passer de lui. Il nous accompagnait partout, à la promenade, au théâtre. Je fis observer à ma tante qu’il était jeune, riche, que cette intimité pouvait me compromettre. Elle me dit alors avec autant de joie que d’orgueil que je m’alarmais à tort. Elle était veuve, libre ; M. de Brévannes lui avait déclaré son amour, et avoué qu’il ne s’était si vivement intéressé à notre procès qu’afin d’avoir accès auprès d’elle. Je voulus faire quelques observations à ma tante ; elle ne me laissa pas achever, se récria avec aigreur sur la vanité des jeunes filles, et me reprocha d’avoir pu croire que M. de Brévannes s’occupait de moi. Il nous voyait chaque jour, envoyait souvent des musiciens sous nos fenêtres, nous offrait des bouquets toujours pareils,