Page:Sue - Paula Monti, tome 2, 1845.djvu/146

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trouble… Oh ! cette femme, je la hais, je la hais… elle est trop heureuse !

« Après tout, pourquoi rougir de mon amour ? Il ne sera jamais coupable… car il ne sera jamais heureux…

« Mon ambition de cœur est trop grande… jamais lui ne saura ce qu’il aurait pu être pour moi, si tous deux nous eussions été libres ! Oh ! quel rêve ! quel paradis !

« La passion que j’éprouve est trop puissante, trop immense, pour descendre jusqu’aux mensonges auxquels nous serions réduits, lui et moi, si nous cherchions les plaisirs d’un amour vulgaire… Non, non… lui appartenir au grand jour, à la face de tous, porter noblement et fièrement son nom… ou ensevelir mon malheureux amour au plus profond de mon cœur… aucune puissance humaine ne me fera sortir de l’une de ces deux alternatives…

« Or, comme lui et moi portons les chaînes du mariage… chaînes bien lourdes !… or, comme le hasard, en libérant l’un de nous deux, ne libérerait pas l’autre… ma vie ne sera qu’un long regret, qu’un long supplice… Ce que je dis est vrai ; je n’ai aucun intérêt à me mentir à moi-même… Je connais assez la fermeté de mon caractère pour être sûre de ma résolution…

« Et puis, lui aussi a tant de volonté, tant d’énergie, que c’est être digne de lui que de l’imiter dans son énergie, dans sa volonté, lors même qu’elles seraient employées à lui résister…