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CONTRASTE



Sa bouche est une fleur à quelque Éden ravie,
Sa grâce embaume l’air de sa chanson joyeux ;
Le printemps de la terre et celui de la vie
D’une double jeunesse animent ses grands yeux.

On dirait que l’Amour, pour veiner sa poitrine,
D’ailes de papillons a formé ses pastels ;
On dirait qu’elle est née en un lit d’églantine
Du plus tendre baiser des deux premiers mortels.

Elle a vu ce vieillard honni de tout le monde,
Elle s’est arrêtée au milieu du chemin ;
Puis elle a sur son cœur penché sa tête blonde,
La pitié dans les yeux et l’aumône à la main.