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la révolte des fleurs.


« Ne gardons que le nécessaire,
Les étamines, le pistil.
Une corolle ! pourquoi faire ?
Mieux vaut pour l’homme un grain de mil ;

« Retirons-lui, dons inutiles,
Nos parfums et nos coloris ;
Que des choses qu’il dit futiles
Il apprenne à sentir le prix ! »

C’est ainsi que parla le rustre à sa manière.
Ce discours, acclamé de la gent printanière,
Fut goûté de la Rose ; on jura sans délai
De clore l’atelier des toilettes de Mai.


II

Le serment fut tenu. Bientôt toute la flore
Vêtit en plein soleil une pâleur d’hiver ;
Sous le terne tapis d’un Avril incolore
Le sol semblait morose et nu comme la mer.