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les destins



II


Ô principe d’amour, de force et d’équité !
Source du pur bonheur et de la dignité,
D’où sort tout être beau comme toute œuvre honnête,
Toi qu’au fond de l’azur, l’homme, en levant la tête,
Salira Dieu, Génie impalpable du Bien,
Es-tu donc endormi ? N’arracheras-tu rien
À l’âpre ambition du Mal qui te défie
Et même, effrontément, à l’aider te convie ?

Il n’a pas attendu cet anxieux appel,
Le gardien vigilant de l’ordre universel :
Au berceau de la Terre, et dans le moment même
Où sur elle tombait le sinistre anathème,
Il veillait, agitant quel est le meilleur sort
Dont il pourra doter ce nouveau-né qui dort.
Devant lui l’ombre cède et la matière tremble,
Car il est la pensée et le moteur ensemble,
C’est lui qui va criant : Que la lumière soit !
Et moule toute forme aux types qu’il conçoit.