Page:Sully Prudhomme - Œuvres, Poésies 1878-1879, 1886.djvu/266

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Des vivants, qu’il fait naître et dont il n’a pas soin,
L’Économe éternel trompe la confiance :
Le besoin donne un droit, le droit une créance ;
Ils sont tous créanciers de l’auteur du besoin.

L’universelle faim, dont il est le témoin,
Réclame chaque jour une ample redevance ;
À lui seul incombait d’y pourvoir à l’avance,
D’apporter la pâture, ou d’y veiller de loin.

Si donc il est un Dieu, l’appétit constitue,
Dans chaque être apte à vivre et que le jeûne tue,
Un droit à s’assouvir, dont lui répond ce Dieu !

Mais partout je ne trouve, en l’absence du maître
Que d’impuissants pasteurs qui règnent en son lieu
Parasites sacrés du troupeau qu’ils font paître.




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