Page:Sully Prudhomme - Œuvres, Poésies 1878-1879, 1886.djvu/334

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.




le poète.



Peuple inhabile à vivre, un jour nous florissons,
Pour languir et déchoir, bien que sans cesse abonde
Dans nos champs, que le soc de plus en plus féconde,
Le trésor séculaire et croissant des moissons :

Les blés offrent leur masse à tous leurs nourrissons,
Invitant la justice à combler tout le monde,
Sans qu’à leur noble appel la Justice réponde,
Sans que les peuples morts nous servent de leçons.

Ah ! n’en accusons pas l’ordre de la Nature,
Du peuple accru la faim débordant la culture :
L’homme par son génie élargit son séjour.

Mais pour juger l’effort, l’ouvrage et le salaire,
La loi sans âme attend qu’on l’échauffe et l’éclaire
Au flambeau du savoir, au foyer de l’amour.