Page:Sully Prudhomme - Œuvres, Poésies 1878-1879, 1886.djvu/61

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même de son unité pour ne mettre en évidence que les résultats de cette destruction. Or ces résultats sont des matériaux que l’analyse a pu dénaturer et qui, loin de former l’essence même du corps, ne font sans doute que poser les conditions où elle peut apparaître et se développer. Synthétiser, c’est simplement rétablir ces conditions.

En résumé, pour ce qui regarde la chimie, nous croyons qu’il serait encore téméraire d’affirmer qu’il n’existe pas de propriété chimique distincte ; nous inclinons plutôt à penser qu’il en existe une se manifestant dans certaines conditions physiques, mais n’étant pas la résultante de ces conditions. Que si l’on arrivait à démontrer que l’affinité est réductible à l’ordre des phénomènes tactiles, la question de la division de substance resterait à résoudre pour les autres espèces de phénomènes perceptibles : des atomes substantiellement distincts et animés de puissances purement mécaniques de même nature que notre force musculaire, peuvent-ils rendre compte des faits de la vie végétative, sensible, consciente, intellectuelle ? C’est ce que nous allons examiner.

Si l’on définit la vie par la nutrition et la génération seulement, abstraction faite de toute sensibilité, on la considère comme un simple mouvement périodique et continu, et l’on peut admettre que la propriété vitale de la molécule n’est, en dernière analyse, quune puissance de se mouvoir. Toutes les fonctions de l’organisme peuvent alors s’expliquer par une composition de mouvements opérée dans des circonstances favorables. Il est vrai que la vie ainsi définie n’est applicable qiiau règne végétal, mais dans cette mesure l’explication peut se soutenir. Les objections tirées de la complexité des phénomènes vitaux, et de leur périodicité, sont sans valeur contre