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Page:Sully Prudhomme - Œuvres, Poésies 1879-1888.djvu/112

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SONNET


a tony robert fleury


Oui, le suprême arbitre en peinture, c’est l’œil :
Nulle inspiration, si l’artiste le blesse,
Ne saurait du pinceau racheter la faiblesse ;
L’œil réclame un plaisir même aux couleurs du deuil.

Mais, tu le sais aussi, l’âme humaine est l’orgueil
Et l’honneur de la terre, et le peintre qui laisse
Une œuvre où l’âme imprime à la chair sa noblesse,
Des plus nobles regards s’est assuré l’accueil.

Cher Tony, tant qu’au ciel Varsovie et Corinthe
Montreront dans les cœurs et les marbres empreinte
La souillure des viols par la force commis,

Que le Juste et le Beau se vengeront des armes
Par les pleurs indignés de leurs derniers amis.
Tu charmeras les yeux en arrachant des larmes.