Page:Sully Prudhomme - Œuvres, Poésies 1879-1888.djvu/176

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Hé bien ! sur leur velours étincelant et tendre
Pour en jouir en paix daigne un moment t’étendre.

______Pendant que tu vas reposer
Je cueillerai ces fleurs aux humides corolles ;
______De leurs lèvres tièdes et molles
Je te ferai sentir le capiteux baiser.
 
______Il faut goûter une par une
Leurs diverses odeurs que le zéphyr confond
______Pour subir leur charme profond
Qu’altère, en les mêlant, son haleine importune.

______Souvent, dans le terrestre exil
Où le deuil et l’espoir nous possédaient encore,
______Des fleurs dont avril se décore
J’ai respiré l’encens moins pur et moins subtil ;

______Et déjà j’y trouvais un baume
A ma peine, à ma joie un signal de réveil ;
______Déjà je trouvais son pareil
A chaque sentiment dans quelque intime arome :

______La violette sous mes pas
Exhalait une exquise et discrète tendresse,
______La rose une jeune allégresse ;
Une chère espérance émanait du lilas.