Page:Sully Prudhomme - Œuvres, Poésies 1879-1888.djvu/31

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.


SUR UNE OREILLE


SONNET


Ce lourd bandeau pour mon chagrin
Dérobe une mignonne oreille ;
Elle fuit les regards, pareille
Au camée en son noir écrin.

Pour y suspendre un bijou fin
Les Grâces l’ont faite à merveille ;
Heureuse la boucle vermeille
Qui la mord d’un baiser sans fin !

Sourde aux médisances traîtresses,
Elle est attentive aux caresses
De Lamartine et de Mozart.

Qui la courtise l’effarouche :
Un soupir timide et sans art
Est le seul aveu qui la touche.