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réflexions sur l’art des vers


J’ai dit à mon cœur, — à mon faible cœur :
N’est-ce point assez — de tant de tristesse ?


La césure répartit les syllabes du vers également entre les deux hémistiches ; mais comme le nombre 5 de syllabes de chacun d’eux est premier, le rythme en est forcément irrégulier, tandis que chaque hémistiche du vers de douze syllabes, divisible par 2 et par 3, comporte deux rythmes réguliers secondaires, ce qui le rend bien plus aisément perceptible à l’oreille. Il est donc naturel que la césure ne se soit pas aussi spontanément placée au milieu du vers de dix syllabes qu’au milieu de l’alexandrin.

Avec le vers de huit syllabes, qui est d’une longueur moyenne, commence la série de ceux qui n’exigent aucun arrangement préconçu de leurs syllabes pour obéir aux lois phonétiques du vers français, dérivées de celle du moindre effort. En réalité et à proprement parler, toutes les syllabes fortes d’un vers quelconque déterminent après elles une césure ; cependant, ce nom