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réflexions sur l’art des vers

à partager plus ou moins inégalement ; il implique le rythme irrégulier au degré le plus simple possible, et n’en comporte pas d’autre.

Ainsi nous avons constaté l’application des trois lois dérivées de celle du moindre effort à la phonétique instinctive du vers tel que l’a fait une évolution rationnelle. À la lumière des mêmes principes on s’explique aisément pourquoi les vers de neuf, onze et treize syllabes n’ont pas été communément adoptés par l’oreille.

Banville cite de Scribe un morceau tout en vers de neuf syllabes à deux césures déterminant trois divisions rythmiques égales. Notre confrère Auguste Dorchain nous a signalé un exemple plus autorisé : c’est une chanson de Malherbe dont chaque couplet a ses deux premiers vers de neufs syllabes aussi, avec la même coupe. Voici l’un d’eux :


L’air est plein — d’une halei — ne de roses,
Tous les vents — tiennent leurs — bouches closes,
Et le soleil semble sortir de l’onde
Pour quelque amour plus que pour luire au monde.