navigation, et des dépôts de provisions en cas de naufrages. Ce fut en 1518 que le baron de Léry fit la première de ces tentatives d’établissement, qui n’eut pour résultat que de laisser sur cette île déserte quelques chevaux, quelques têtes de bétail et des lapins qui se sont multipliés à l’état sauvage. Ces animaux furent, avec la pêche, les seuls moyens de subsistance des colons de la seconde expédition colonisatrice que M. de la Roche déposa sur cette île, en 1578, comme ils ont offert depuis une précieuse ressource aux navigateurs et pêcheurs en détresse. Il ne reste aujourd’hui, des animaux ainsi transplantés au commencement du XVIe siècle, que des lapins qui ont fait garenne et des chevaux dont la troupe semble se maintenir au chiffre d’environ cent cinquante ; le bétail a, depuis plusieurs années, disparu, le troupeau ayant fini par s’éteindre sous l’effet des chasses répétées, exécutées par les équipages des navires de pêche. On voit que cette île inhospitalière, ce banc de sable perdu dans l’océan, a son histoire comme aussi sa légende[1]. »
Dès lors, paraît-il, on avait pris l’habitude de désigner sous le nom de Nouvelle-France tous ces pays, îles et continent qui avoisinent les bouches du grand fleuve et dont l’intérieur était encore très-vaguement connu même aux plus légères distances. Plus tard, ce nom fut aussi donné à une région de l’Araucanie relevant du Chili. De nos jours, un commencement de colonie dans la mer des Indes s’est aussi appelée la Nouvelle-France[2]. Le nom de Canada n’a été adopté qu’à la suite des explorations dans le fleuve même.
C’est au capitaine Jacques Cartier que revient l’honneur d’avoir pénétré assez loin dans le Saint-Laurent pour attacher son nom à la découverte de notre pays. Ce navigateur était de Saint-Malo[3] ; c’est de là qu’il partit, le 20 avril 1534, sur l’ordre de François Ier, avec deux navires d’une soixantaine de tonneaux chacun, montés par soixante et un hommes.
Le 10 mai, il atteignait la côte orientale de Terreneuve, à Bonavista ou Bonnevue, vers l’endroit où, dix ans auparavant, Jean Verazzani s’était arrêté, au cours d’une exploration faite pour le compte de François Ier. Comme la côte dans la direction du sud était connue, Cartier se dirigea au nord, le 21 mai, vit l’île aux Oiseaux et entra (27 mai) dans le détroit de Belle-Isle, qu’il nomma golfe des Châteaux. Les glaces le retinrent dans le havre de Quirpont jusqu’au 9 de juin. Prolongeant alors la côte du Labrador, il entra, le 10 juin, dans le port de Brest, où, le lendemain, fut dite une messe, et il en partit le même jour pour aller dans un havre qu’il appela Saint-Servain (aujourd’hui Rocky-Bay) et y planta une croix. Tous ces lieux étaient fréquentés des Français. Rendu à la baie de Nepetepec, Cartier rencontra un grand vaisseau de la Rochelle. Ils allèrent ensemble à quelque distance de là, à la baie de Checatica qui fut nommée Jacques-Cartier. Le détroit de Belle-Isle se trouvait tellement élargi que les navigateurs ne voyaient plus la terre à leur gauche : ils étaient dans l’embou-
- ↑ J.-C. Taché, Recensement de 1871, page XIII. Voir aussi le Cours d’Histoire du Canada de l’abbé Ferland, I, 12.
- ↑ Il y a à Paris une caserne qui porte ce nom.
- ↑ Au mois d’août 1532, la Bretagne avait été annexée à la France. L’expédition confiée au pilote malouin était propre à flatter les Bretons.