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CHAPITRE II

1598 — 1603


Paix de Vervins. — Le marquis de la Roche. — Pontgravé. — Chauvin. — Tadoussac. — De Monts. — Les Malouins. — De Chaste. — Champlain. — Pontgravé, les Malouins. — Tadoussac. — Alliance avec les Sauvages. — Trafic des Sauvages entre eux. — Québec. — Trois-Rivières. — Montréal. — De Chaste. — Sully. — Projet d’une émigration française.



A

u temps où le roi Henri iv signait le traité de Vervins (1598), qui ramenait en France la concorde et la paix disparues depuis le commencement des guerres de religion (1562), quelques navigateurs se mirent à penser que l’heure n’était pas mal choisie pour occuper la cour et le commerce de certaines terres inconnues de l’Amérique du Nord à travers lesquelles venait aboutir à la mer Atlantique le fleuve Saint-Laurent, grand chemin royal dont les sources, placées à des distances fabuleuses, n’avaient jamais été visitées par les Européens. La voie de la Chine et du Japon devait, croyait-on, se rencontrer par là en ligne plus ou moins droite.

À part cette idée, il en existait une autre : celle des négociants qui savaient déjà ce que valaient les fourrures de la Nouvelle-France, et qui cherchaient à s’en assurer le trafic.

La paix, rétablie dans le royaume, faisait présager des jours prospères pour le commerce, les découvertes, et même pour des habitations lointaines. Après avoir déposé les armes, il était à croire que les seigneurs et les hauts barons se laisseraient tenter par la perspective d’acquérir et de l’honneur et des richesses dans un genre nouveau d’emploi qui avait, lui aussi, son caractère chevaleresque. Or, à cette époque où le souverain faisait toute la loi, quand il la faisait, une entreprise un peu importante n’allait pas sans son consentement, ou tout au moins celui de ses favoris. Voilà pourquoi de la tranquillité qui suivit le traité de Vervins et rendit la cour à elle-même, on eut lieu de supposer qu’il naîtrait un désir de protéger les navigations d’outre-mer et le trafic qui en découlait. Le simple commerçant l’espérait pour en tirer son bénéfice. D’autres, aux vues plus élevées, calculaient l’extension de la puissance navale et coloniale de la France, et n’étaient pas les moins actifs dans leurs démarches.

La paix était à peine signée que le marquis de la Roche[1] reparut et obtint une com-

  1. Il avait été attaché à la cour dès sa jeunesse comme page de Catherine de Médicis. Protégé par la reine, il reçut de nombreuses faveurs de Henri ii, François ii et Charles ix. (Le Droit civil canadien : Loutre & Lareau, p. 7.) Il était donc né avant 1540.
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