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HISTOIRE DES CANADIENS-FRANÇAIS

déclara son intention de servir Dieu dans ces pays lointains, et le père lui ménagea une entrevue avec M. de la Dauversière, mais sans le prévenir de ce qui devait se passer entre eux. L’un et l’autre ne tardèrent pas à s’apprécier, et bientôt il ne fut plus question que du départ de l’expédition. M. de Chomedey refusa d’abord son consentement au projet de son fils, mais il finit par céder lorsqu’on lui représenta la gloire militaire qui rejaillirait sur sa famille par le commandement d’un poste aussi exposé que Montréal[1].

Cependant, aux yeux de la compagnie des Cent-Associés, M. de Lauson était toujours le concessionnaire de l’île de Montréal. Pour faire cesser tout doute et régulariser la situation, l’acte qui suit fut passé le 17 décembre 1640 :

« La compagnie de la Nouvelle-France, à tous présents et à venir, salut : Notre plus grand désir étant d’établir une forte colonie en la Nouvelle-France, afin d’instruire les peuples sauvages de ces lieux en la connaissance de Dieu et les attirer à une vie civile, nous avons reçu très volontiers ceux qui se sont présentés pour nous aider en cette louable entreprise, ne refusant point de leur distribuer quelques portions des terres à nous concédées par le roi notre souverain seigneur ; à ces causes étant bien informés des bonnes intentions de Pierre Chevrier, écuier, sieur de Fancamp et de Hiérosme le Royer sieur de la Dauversière, et de leur zèle à la religion catholique, apostolique et romaine et affection au service du roi, nous avons aux dits sieurs Chevrier et le Royer donné, concédé et octroyé, et en vertu du pouvoir à nous attribué par Sa Majesté donnons, concédons et octroyons par ces présentes les terres ci-après déclarées, c’est à savoir : une grande partie de l’île de Montréal, située dans le fleuve de Saint-Laurent, entre le lac Saint-Pierre et le lac Saint-Louis, à prendre la dite partie de l’île à la pointe qui regarde le nord-est, tirant en toute sa largeur vers le sud-ouest jusques à la montagne de Montréal qui a donné le nom à la dite île, et par-delà icelle montagne encore quatre lieues françaises ou environ et jusques à l’embouchure du petit ruisseau qui est dans la dite île à la dite espace de quatre lieues ou environ, se déchargeant dans le canal qui sépare la dite île de Montréal d’une autre île appelée l’île de Jésus, le reste de la dite île à prendre depuis l’embouchure du dit ruisseau jusques à la tête d’icelle, qui est vers le sud-ouest, réservé[2] à la dite compagnie, de l’embouchure duquel ruisseau sera tirée une ligne droite jusques à l’autre bord de la dite île qui est sur le dit lac Saint-Louis, comme elle a été présentement tirée sur la carte et plan de la dite île envoyée de la Nouvelle-France par M. de Montmagny, gouverneur du dit pays ; lequel plan a été paraphé par les directeurs de la dite compagnie et par le dit sieur le Royer en cet endroit pour faire foi des bornes de la présente concession et demeurer attaché à la minute des présentes entre les mains du secrétaire de la compagnie, afin d’y avoir recours si besoin est ; plus, une étendue de terre de deux lieues de large, le long du fleuve Saint-Laurent, sur six lieues de profondeur dans les dites terres[3], à prendre du côté du nord sur la même côte où se décharge la rivière de

  1. Dollier de Casson : Histoire du Montréal, 16, 17, 46 ; Faillon : Histoire de la colonie, I, 406-8.
  2. L’acte de 1636 accordait toute l’île au sieur de la Chaussée.
  3. C’est la seigneurie de Saint-Sulpice. La compagnie de Montréal ne l’avait pas demandée. (Faillon : Histoire, I, 396-7.)