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HISTOIRE DES CANADIENS-FRANÇAIS

sur le pied de quarante sous tournois la pièce… Et pour exciter d’autant plus les sujets de Sa Majesté à se transporter ès dits lieux et y faire toutes sortes de manufactures, accordera Sa Majesté que tous artisans du nombre de ceux que les dits associés s’obligent de faire passer au dit pays et qui auront exercé leurs arts et métiers en la dite Nouvelle-France durant six ans, en cas qu’ils veulent retourner en ce royaume, seront réputés pour maîtres de chef-d’œuvre et pourront tenir boutique ouverte dans Paris et autres villes… Et attendu que les marchandises, de quelque qualité qu’elles puissent être, qui viendront des dits pays et particulièrement celles qui seront manufacturées ès lieux de la Nouvelle-France, proviendront de l’industrie des Français, Sa dite Majesté exemptera, pendant quinze ans, toutes sortes de marchandises, provenant de ladite Nouvelle-France, de tous impôts et subsides, bien qu’elles soient voiturées, amenées et vendues en ce royaume… Sa Majesté ennoblira jusqu’à douze des dits associés, lesquels jouiront à l’avenir de tous privilèges de noblesse, ensemble leurs enfants nés et à naître en loyal mariage… Ordonnera Sa Majesté que les descendants des Français qui s’habitueront au dit pays, ensemble les sauvages qui seront amenés à la connaissance de la Foi et en feront profession, seront censés réputés naturels français et comme tels pourront venir habiter en France, etc…[1] »

Deux des articles portent, en outre, que le roi donne à perpétuité aux associés, en toute propriété, justice et seigneurie, le fort et habitation de Québec avec tout le pays de la Nouvelle-France, dite Canada, le long des côtes depuis la Floride, en rangeant les mêmes côtes jusqu’au cercle arctique, et depuis l’île de Terreneuve jusqu’au grand lac (Huron) ou mer douce ; les dites terres pourront, au gré des associés, être améliorées, aménagées et distribuées aux personnes qui les habiteront ; néanmoins, en cas d’érection de duchés, marquisats, comtés et baronnies, seront prises lettres de confirmation de Sa Majesté. Ce peu de mots renfermait en germe la tenure des terres du Canada, chose bien humble et bien utile toute à la fois, mais dont plusieurs écrivains ont fait une institution pompeuse et nuisible, après l’avoir baptisée du faux nom de régime féodal. Nous y reviendrons.

Membres de la compagnie des Cent-Associés qui acceptent la charte ci-dessus : Claude de Roquemont, écuyer, sieur de Brison, demeurant à Paris, rue du Temple, paroisse Saint-Nicolas-des-Champs ; noble homme maître Louis Houel, sieur du Petit-Pré, conseiller du roi et contrôleur-général des salines en Brouages, demeurant à Paris, rue des Bernardins, paroisse Saint-Nicolas-du-Chardonnet, tant pour lui que pour noble homme David Duchesne, conseiller, échevin de la ville du Havre-de-Grâce, et pour noble homme Gabriel de Lataignant, majeur de la ville de Calais, y demeurant ; noble homme Simon Dablon, syndic de la ville de Dieppe et y demeurant, étant aussi de présent en cette ville de Paris, logé rue Montorgueil, en la maison du Cheval-Blanc, dite paroisse Saint-Eustache ; honorable homme Jacques Castillon, bourgeois de Paris, y demeurant, rue du Mouceau et paroisse Saint-Gervais[2]. »

  1. Édits et Ordonnances, i, 5-10. Nous avons supprimé certains passages sans valeur pour notre travail.
  2. Édits et Ordonnances, i, 11