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sont un reste d’allusion aux sacrifices humains de l’ancien culte gaulois. Cela rappelle le chant de Velléda dans les Martyrs de Châteaubriand : « Teutâtes veut du sang… au premier jour du siècle… il a parlé dans le chêne des druides. » ”

De la guignolée aux chansons populaires du Canada, il n’y a qu’un pas. Occupons-nous en quelque peu, quand ce ne serait que pour attester du goût des Canadiens dans ce genre de plaisir si éminemment français. Il va de soi que nos chansons ne viennent pas toutes du nord de la France, puisque les colons du Canada se recrutaient dans cent endroits divers et, comme on chante partout en France, au sud, à l’est, à l’ouest tout aussi bien qu’au nord, le répertoire des chanteurs canadiens est extrêmement varié aujourd’hui, et l’a toujours été.

Les musiciens ont observé certaines modifications dans les airs retenus au Canada ; mais, chose assez curieuse, ces changements sont à l’avantage de la chanson. De leur côté, les écrivains affirment que les paroles de ces couplets se sont notablement améliorées dans notre bouche. Ceci est dû, selon toute apparence, à la fréquentation journalière des colons avec des hommes instruits ; car on sait les habitudes des premiers Canadiens, depuis le temps de Champlain jusqu’à la conquête, et même longtemps après. Petit à petit, l’influence des gens capables de polir un vers, de remplacer une expression incorrecte ou grossière, dut se faire sentir sur les Canadiens qui chantaient. Supposons des « voyageurs » faisant un trajet de deux ou trois cents lieues en compagnie des pères jésuites : il est à croire que plus d’un bon conseil devait résulter de cette rencontre, et contribuer à transformer plus ou moins ces légers poèmes — trop légers parfois.




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