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histoire des canadiens-français

bien surpris, le 19 janvier, lorsqu’on nous envoya notre requête répondue de la sorte : « Attendu que les officiers ont remis la traite du castor aux habitants du pays et qu’ainsi ils n’envoyent point de vaisseaux en la Nouvelle-France, la compagnie a résolu que la requête sera communiquée au conseil de Québec et syndic du pays, pour, leur avis rapporté, être pourvue par les directeurs et associés. Ainsi qu’il appartiendra, par raison fait le 16 janvier 1651, en l’assemblée de la Nouvelle-France. Signé : A. Cheffault, secrétaire de la dite compagnie, avec paraphe. »

« On voit assez que la réponse écrite n’était pas conforme à la résolution de l’assemblée puisque, dans cette réponse, M. de Lauzon avait fait glisser quelle serait communiquée au conseil de Québec, au lieu que messieurs de la compagnie, comme la plupart nous en assurèrent, n’avaient demandé autre chose que de communiquer notre requête aux députés et habitants du pays qui étaient alors en France.

« Nos pères eurent recours aux susdits députés, qui nous donnèrent tous leurs certificats et nous dirent en même temps qu’ils avaient appris de bonne part que notre affaire s’en irait à rien si messieurs de la compagnie ne donnaient une autre réponse sur une nouvelle requête ; que c’était nous amuser inutilement de nous renvoyer par devant le conseil de Québec qui était composé du gouverneur, créature des révérends pères jésuites, du supérieur de la mission, d’un syndic et habitants que l’on gagnerait aisément pour empêcher notre retour. Ils nous ajoutèrent même que l’on était sur le point d’envoyer M. de Lauzon en qualité de gouverneur, et que nous pouvions prendre là-dessus nos mesures.

« Nouvelle requête présentée à messieurs de la compagnie le 20 janvier (1651), dont l’assemblée se tenait chez monsieur des Portes ; M. de Lauzon fit si bien qu’il ne s’y trouva de nos amis que messieurs Margonne et Robinot : les autres, particulièrement monsieur de la Madeleine, déclarèrent qu’il s’en fallait tenir aux termes de la réponse couchée sur notre requête ; qu’au reste il nous donnait toute permission de passer, pour solliciter notre affaire auprès des messieurs du conseil de Québec, laquelle réponse nous fut signifiée dans les formes.

« Ainsi finit notre négociation, qui se termina à envoyer le résultat à Québec, avec des lettres de recommandation de plusieurs personnes ; l’on en obtint même du révérend père provincial des jésuites et du révérend père Lallemant, supérieur de la maison professe qui était alors en France, supérieur des missions, celui-ci nous promettant toutes sortes de faveurs lorsqu’il serait au pays ; il voulut bien en écrire une lettre de protestation à notre révérend père provincial, et à la province, si bien que nous ne désespérions pas encore de notre retour (au Canada).

« Le lecteur peut juger que, si les révérends pères jésuites avaient été en notre place et les récollets à la leur, nous n’aurions pas manqué de faire valoir et entériner leur requête et d’y employer notre crédit, puisqu’autrefois nous avions tenu ferme contre tout le pays pour les appeler en Canada, et ensuite pour les y soutenir lorsqu’ils y furent arrivés en 1625 et que le gouvernement et les habitants s’opposaient à leur réception. La charité, qui est droite