Page:Sulte - Histoires des Canadiens-français, 1608-1880, tome III, 1882.djvu/54

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
38
histoire des canadiens-français

Iroquois : les pères Jogues (1646), Daniel (1649), Brebeuf (1649), Garnier (1649), Chabanel (1649), et l’année 1652 vit succomber le père Buteux.

Les dix soldats promis arrivèrent à Montréal, le 10 décembre, dans un tel état de pénurie qu’on « les prenait pour des spectres vivants qui venaient, tout squelettes qu’ils étaient, affronter les rigueurs de l’hiver, » dit M. Dollier de Casson. L’un de ces hommes, André Charly dit Saint-Ange, natif de la paroisse de Saint-Gervais de Paris, épousa, à Montréal (1654), Marie Dumesnil, de l’Anjou, et laissa une nombreuse descendance. Un autre, Honoré Langlois dit Lachapelle, chapelier, aussi de Paris, se maria (1661), au même endroit, avec Marie Pontonnier.

Le mère de l’Incarnation parle de l’arrivée d’un grand nombre de personnes en 1651. Nous avons tenté de réunir leurs noms dans les tableaux que le lecteur trouvera plus loin.

L’octroi de quelques seigneuries marque les débuts de l’administration du nouveau gouverneur-général. Madame Éléonore de Grandmaison, veuve de M. François de Chavigny, demeurait à l’île d’Orléans, mais elle tenait à conserver les deux fiefs de Chavigny concédés à son époux en 1640 et 1647. C’est pourquoi, le 1er mars 1652, M. de Lauson lui accorda le titre suivant : « L’intention de la compagnie de la Nouvelle-France ayant toujours été de faire le possible afin de peupler la Nouvelle-France, et de veiller sur ceux qui, sous prétexte d’avoir ce dessein, auraient obtenu de la même compagnie des concessions avec des conditions avantageuses, pour, en cas de négligence de leur part, en gratifier d’autres particuliers, pour les faire valoir, et sur le rapport qui nous a été fait que François de Chavigny, sieur de Berchereau, ayant quitté la Nouvelle-France, il y aurait abandonné tout ce qu’il y possédait, et que, laissant les affaires en cette incertitude, cela pourrait empêcher d’autres particuliers de cultiver les dits lieux au bénéfice du pays, et ayant ci-devant fait publier notre ordonnance[1], par laquelle nous avons enjoint à tous particuliers ayant concession de la compagnie non-seulement de se faire mettre en possession, mais de travailler incessamment au défrichement, autrement déchus de leurs concessions, desquelles nous disposerons en faveur d’autres personnes qui les feraient valoir — à ces causes… nous avons, par ces présentes, disposé des lieux par lui ainsi abandonnés… en faveur de damoiselle Éléonore de Grandmaison… aux mêmes charges, clauses et conditions… (Signé) De Lauzon. Et plus bas : par monseigneur : (signé) Le Sieur[2]. » On remarque combien est sévère M. de Lauson au sujet de l’obligation de défricher et mettre les terres en valeur. Excellente pratique dont il ne tenait pas beaucoup compte lorsque sa famille était en cause. La concession ci-dessus mesurait une lieue au fleuve ; elle passa à Jacques-Alexis de Fleury Deschambault, marié (1671) à Marguerite de Chavigny. Un autre fief, voisin, d’une lieue de front, fut accordé, en 1672, à Éléonore de Grandmaison, mariée en secondes noces avec le sieur Jacques Descailhaut de la Tesserie. De cette manière, la seigneurie dite Deschambault s’étend de celle de Portneuf à celle des Grondines.

  1. Pas connue d’ailleurs.
  2. Titres seigneuriaux, p. 378.