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Page:Sulte - Histoires des Canadiens-français, 1608-1880, tome IV, 1882.djvu/130

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HISTOIRE DES CANADIENS-FRANÇAIS

Un « bureau » formé de femmes infiniment respectables du Canada : la mère de l’Incarnation, Mlle Mance, madame Bourdon et madame d’Ailleboust, supportées par des personnes pieuses de la cour et de la bourgeoisie de France, c’est plus qu’il n’en faut pour garantir nos mères canadiennes contre toute accusation ; pourtant, il y a des écrivains qui se font un plaisir d’attaquer « les filles venues de Paris. » Tant il est vrai que la malice ne reconnaît pas de preuve contraire.

L’influence de l’esprit religieux dans le choix de ces filles avait été prépondérante. Les jésuites, sans pitié pour eux-mêmes, ne l’étaient pas davantage pour les autres, surtout lorsqu’il s’agissait de la morale ; on ne peut qu’applaudir à cela. Les sulpiciens de même. Des femmes comme la sœur Bourgeois, le mère de l’Incarnation, madame Bourdon, madame d’Ailleboust, Mlle Mance, sont, plus que la femme de César, à l’abri du soupçon.

Passé en France (1667) dans l’intérêt de la colonie, Talon reçut du roi (5 avril 1668) des instructions dont voici le texte : « L’intendant, en arrivant, doit faire le recensement de tous les habitants du pays, faire tenir registre des baptêmes, décès et mariages ; renouveler le recensement chaque année ; prendre tous les moyens possibles pour l’augmentation de la population, mariages, immigrations, etc. Il doit tenir à l’administration fidèle et sans frais de la justice, bannir les chicanes, les divisions, les contentions ; visiter souvent les familles et les assister, prendre soin des malades, chercher les remèdes aux maladies du pays ; convaincre ceux qui souffrent que leur conservation est très chère au roi et très nécessaire au public ; observer la conduite des juges et des autorités, les avertir s’il est nécessaire ; exciter le peuple au travail, lui en fournir tous les moyens en donnant des terres, en établissant des manufactures, etc., etc., et en particulier des pêcheries sur le Saint-Laurent, qui pourraient être si productives ; établir des relations avec les îles des Antilles en y portant du poisson, des viandes et les bois dont elles ont besoin ; rechercher les mines et les mettre en exploitation ; s’occuper de la conservation et de la multiplication des bestiaux ; envoyer à la Rochelle tout ce qui peut convenir à la construction et au gréement des vaisseaux, comme chanvre, fer, plomb, charbon de terre, bois de toutes sortes et de toutes dimensions ; observer la conduite des dépositaires de l’autorité, ne prendre jamais parti dans leurs divisions, afin d’être plus en état de concilier les esprits ; rappeler aux sauvages, pour les attirer au christianisme, qu’il a été statué par le cardinal de Richelieu que tout sauvage amené à la profession de la religion acquiert tous les droits de la nationalité française dont il pourra jouir au Canada et même en France, s’il y venait résider ; examiner avec soin le tort qui est produit par le commerce du vin et des eaux-de-vie. »

La lettre suivante de la mère de l’Incarnation (octobre 1669) est remplie de détails curieux : « J’ai reçu votre dernière lettre par les mains de madame Bourdon et de son fils, qui, en même temps, ont été ravis de pouvoir me dire de vos nouvelles ; ils se sentent comblés du bon accueil que vous leur avez fait, et comme ce sont de mes meilleurs amis, et que c’est à mon occasion que vous leur avez rendu cet honneur, je vous en remercie de tout mon cœur. Madame Bourdon a été chargée en France de cent cinquante filles que le roi a envoyées