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CHAPITRE II

1663


Le roi retire le Canada des mains des Cent-Associês



C

olbert, sortant des sentiers battus, désirait faire de la France un empire colonial. Louis XIV se plaisait à répéter devant son conseil : « Messieurs, voici M. Colbert qui va nous dire : « Ce grand cardinal de Richelieu voulait la domination des mers. » En effet, l’idée féconde du premier ministre de Louis XIII devait faire la grandeur du règne de Louis XIV. Colbert trouvait les finances du royaume obérées ; ni le commerce de l’intérieur ni celui du dehors n’étaient dignes d’un État aussi favorisé du ciel que l’est la France. Les Hollandais remplissaient de leurs vaisseaux les ports de l’Europe, et leur pavillon avait la prépondérance dans les colonies. Les Français intéressés au trafic avec les pays lointains étaient en quelque sorte à la merci d’Amsterdam. Dans les îles et sur les continents nouveaux où la France possédait des établissements, on avait constitué, comme au Canada, des sociétés privilégiées qui abusaient de tout et ne contribuaient point à l’extension de la puissance française. Colbert résolut d’abolir ces compagnies et de faire remettre aux mains du roi la gouverne et la direction de ces vastes contrées pleines de richesses et de ressources en tous genres.

La Relation de 1652 s’exprime ainsi : « Il y a quelque temps qu’on demandait des soldats, et leur solde ou leurs appointements. On demandait leurs vivres et leurs armes et leur passage ; à présent que le pays donne des blés[1] pour nourrir ses habitants et qu’il se fait (se développe) tous les jours, on ne demande plus, pour le soutien de ces grandes contrées, que le paiement du passage de deux ou trois cents hommes de travail chaque année ; les habitants du pays les nourriront et payeront leurs gages. La France, qui se décharge incessamment dans les pays étrangers, ne manque pas d’hommes pour dresser des colonies. Dieu veuille qu’elle ait assez de charité pour les faire passer en un lieu où ils vivraient plus saintement et plus à leur aise, et où ils seraient la défense et le secours de Jésus-Christ, qui honore tant les hommes, qui les veut sauver par le secours des hommes. »

  1. En relevant les nombreuses mentions que renferment les lettres des missionnaires et autres personnes, de 1640 à 1665, on voit clairement que les cultures du pays rendaient assez de blé et autres produits pour la nourriture de ses habitants.