étrangers s’acclimatent de suite. Les Anglais ont souvent remarqué que les Américains, nés de parents européens, ne peuvent supporter aussi facilement les voyages par mer que ceux qui sont nés en Europe ; ils ne peuvent non plus parcourir, avec la même impunité, les différentes contrées de l’Amérique du Sud. Les Français, natifs du Canada, ont la même constitution, et ceux d’entre eux qui vont dans les îles des Indes Occidentales, à la Martinique, à Saint-Domingue, et y restent quelque temps, tombent malades et meurent bientôt après, à moins qu’on ne les ramène au Canada. Au contraire les Français qui partent directement de leur pays pour aller s’établir dans les îles, s’acclimatent plus aisément, et y vivent plus longtemps… La politesse des habitants ici est bien plus raffinée que celle des Hollandais et des Anglais des colonies appartenant à la Grande-Bretagne, mais en revanche ces derniers ne donnent pas autant de temps à leur toilette que les Français. Les gentilshommes portent généralement leurs propres cheveux, mais il y en a qui font usage de perruques. Les gens de condition mettent du linge garni de dentelles ; tous les officiers de la couronne ont l’épée… Des amis, de l’un ou de l’autre sexe, qui ne se sont pas vus depuis quelque temps, se saluent en s’embrassant mutuellement lorsqu’ils viennent à se rencontrer… Les hommes sont extrêmement polis et saluent en ôtant leurs chapeaux, chaque personne indistinctement qu’ils rencontrent dans les rues. Il est d’usage de remettre une visite le lendemain même, en eût-on des vingtaines à faire dans la journée… La différence entre les manières et les coutumes des Français à Montréal et au Canada, et celles des Anglais dans les colonies américaines, est la même qui existe entre ces deux nations en Europe. Au Canada, les femmes en général sont belles ; elles sont bien élevées et vertueuses, et ont un laisser-aller qui charme par son innocence même et prévient en leur faveur. Elles s’habillent beaucoup le dimanche, mais les autres jours, elles s’occupent assez peu de leur toilette, sauf leur coiffure qu’elles soignent extrêmement, ayant toujours les cheveux frisés et poudrés, ornés d’aiguilles brillantes et d’aigrettes. Chaque jour de la semaine, elles portent un mantelet petit et élégant, sur un court jupon qui va à peine à la moitié de la jambe, et dans ce détail de leur ajustement elles paraissent imiter les femmes indiennes. Les talons de leurs souliers sont élevés et très étroits ; je m’étonne qu’ainsi chaussées elles puissent marcher à l’aise. En fait d’économie domestique, elles surpassent grandement les Anglaises des plantations, qui ne se gênent pas de jeter tout le fardeau du ménage sur leurs maris, tandis qu’elles se prélassent toute la journée assises les bras croisés. Les femmes au Canada, au contraire, sont dures au travail et à la peine, surtout parmi le bas peuple ; on les voit toujours aux champs, dans les prairies, aux étables, ne répugnant à aucune espèce d’ouvrage. Cependant, elles se relâchent un peu à l’égard de la propreté des ustensiles et des appartements, car, dans quelques maisons, aussi bien à la ville qu’à la campagne, les planchers ne sont lavés qu’une fois par six mois… En général, les dames ne refusent pas de prendre leur part des soins du ménage, et j’ai vu avec plaisir des filles du meilleur monde, voire même celles du gouverneur, habillées pour l’occasion, aller dans les cuisines et les celliers pour s’assurer que tout y était en ordre… Toutes les
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HISTOIRE DES CANADIENS-FRANÇAIS