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HISTOIRE DES CANADIENS-FRANÇAIS

ment le pouce : un petit apprentissage était nécessaire. Les femmes se servaient de couteaux de poche ordinaires qu’elles achetaient chez les boutiquiers.

« Les anciens Canadiens avaient pour habitude, même à leurs moindres réunions, de chanter à leurs dîners et soupers : les dames et les messieurs alternativement.

« Les enfants des cultivateurs ne mangeaient autrefois à la table de leurs père et mère qu’après leur première communion. Il y avait, dans les familles aisées, une petite table très basse pour leur usage ; mais généralement leurs enfants prenaient leur repas sur le billot ; il y en avait toujours plusieurs dans la cuisine, qui était quelquefois la chambre unique des habitants : ces billots suppléaient dans l’occasion à la rareté des chaises et servaient aussi à hacher et à débiter la viande pour les tourtières (tourtes) et les pâtés des jours de fêtes. Il ne s’agissait que de retourner le billot, suivant le besoin. Dans leurs petites querelles, les enfants plus âgés disaient aux plus jeunes : — Tu manges encore sur le billot ! ce qui était un cruel reproche pour les petits.

« Ce n’était guère l’usage autrefois, dans les campagnes, de fermer, pendant la nuit, les maisons, soit au verrou soit à la clef. Une serrure était un aussi grand objet de curiosité pour nos bons et paisibles habitants que les poêles de fer,[1] dont les premiers firent apparition pendant mon enfance, dans la paroisse de Saint-Jean Port-Joli. On se rendait le dimanche, d’une lieue à la ronde, chez l’heureux propriétaire d’un meuble si précieux et d’un ornement de si grand luxe. »

  1. Les premiers poêles de fonte fabriqués au Canada datent de 1730 à 1736.