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HISTOIRE DES CANADIENS-FRANÇAIS

Gouvernement des Trois-Rivières. — Cap de la Madeleine 33 hommes ; Champlain 79 ; Batiscan 92 ; Rivière Batiscan 92 ; Sainte-Marie 55 ; Sainte-Anne 70 ; Saint-Pierre et Gentilly 55 ; Bécancour 53 ; Nicolet 55 ; baie Saint-Antoine 54 ; Saint-François 96 ; Maska 74 ; Maskinongé 48 ; Rivière-du-Loup 62 ; Yamachiche 69 ; Pointe-du-Lac 39 ; Trois-Rivières 70 ; 17 paroisses. — Total 1,046 hommes pour le gouvernement des Trois-Rivières.

Vers ce temps, M. Rouillé, ministre de la marine, disait : « Le Canada a au moins quinze mille hommes de milice en état de porter les armes, sur lesquels on peut compter en tout temps. » La guerre commencée en 1744 sévissait toujours en Amérique, mais en 1753 cette situation pénible s’accentua. La France marchait évidemment à la crise militaire et financière qui devait lui faire perdre ses colonies. Au lieu du repos dont nous avions tant besoin, une tâche nouvelle, colossale, inouïe, nous était imposée. Les habitants, dit Garneau, « conservaient la confiance d’autrefois et l’ardeur nécessaire pour faire de vigoureux soldats. Privés de toute participation à l’administration publique, ils s’occupaient à exploiter leurs terres et à faire dans leurs forêts la chasse aux animaux sauvages, dont les riches fourrures formaient la principale branche de leur commerce. Peu nombreux, ils ne pouvaient se flatter d’ailleurs que leurs conseils eussent beaucoup de poids dans la métropole. Ils lui représentèrent le danger de la lutte qui allait s’engager, et prirent les armes avec la ferme résolution de combattre comme si la France eût fait les plus grands sacrifices pour les soustraire au sort qui les menaçait. Ils ne chancelèrent jamais ; ils montrèrent jusqu’à la fin une constance et un dévouement que les historiens français n’ont pas toujours su apprécier, mais que la vérité historique, appuyée sur des pièces officielles irrécusables, ne permet plus aujourd’hui de mettre en doute. »

La milice, écrivait Bougainville en 1757, se compose de « tous les habitants en état de porter les armes, depuis quinze ans jusqu’à soixante ; ils sont inscrits et obligés de servir toutes les fois que le gouverneur général les commande. Ils ont des officiers dans chaque paroisse ; les capitaines y ont des grandes considérations ; un banc à l’église avant celui des co-seigneurs ; c’est à eux que tous les ordres s’adressent, quand ils servent ; ainsi que leurs miliciens, ils ne reçoivent aucune solde, mais la subsistance et un équipement ; ils n’ont aucun rang avec les troupes réglées et seraient même commandés par les sergents des troupes réglées. Monsieur le marquis de Vaudreuil pense proposer pour capitaines de milices ceux qui se distinguent et de leur faire venir des commissions du roi ; et alors ils auront rang avec les officiers des troupes réglées, comme lieutenants du jour de cette nouvelle commission ; lorsqu’ils sont blessés ou estropiés au service, le gouverneur général leur procure une petite gratification annuelle. »

Quelques citations de M. Rameau qui a si savamment étudié notre caractère, trouvent ici leur place : « L’histoire nous montre, dit-il, que les colons français étaient :

« Plus vigoureux de corps, plus énergiques d’esprit, et plus ingénieux que leurs voisins ; ils étaient même, ce qui heurte bien plus encore l’opinion commune, plus entreprenants et plus intelligents ; leur société était plus virile.