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HISTOIRE DES CANADIENS-FRANÇAIS

dominateur voulait tout faire plier sous sa volonté ; et ce penchant, confirmé chez lui par le zèle religieux, dégénéra, sur le petit théâtre où il était appelé à figurer, en querelles avec les hommes publics, les communautés religieuses, et même avec les particuliers. Il s’était persuadé qu’il ne pouvait errer dans ses jugements, s’il agissait pour le bien de l’Église, et il entreprit des choses qui auraient été exorbitantes en Europe. Il voulut faire de tout son clergé une milice passive, obéissant à un chef, comme les jésuites à leur général. Il chercha même à se faire un instrument du pouvoir civil, et il lui fit décréter l’amovibilité des curés et le paiement des dîmes à son séminaire. Mais ses projets, sans exemple en France depuis longtemps, n’eurent point de succès. Il trouva des adversaires déclarés dans les gouverneurs, tous plus ou moins jaloux de son influence et souvent soutenus par l’opinion publique qui oscillait entre les maîtres, pour diviser et affaiblir peut-être le poids du joug. »

Au mois de mai 1679, le roi rendit une ordonnance dont les dispositions se lisent comme suit : « Nous ayant été rapporté que divers seigneurs et habitants de notre pays de la Nouvelle-France désiraient avoir des curés fixes pour leur administrer les sacrements, au lieu de prêtres et curés amovibles qu’ils avaient eu auparavant, nous aurions donné nos ordres et expliqué nos intentions sur ce sujet les années dernières, et étant nécessaire à présent de pourvoir à leur subsistance et aux bâtiments des églises et paroisses, et se servir pour cet effet des mêmes moyens qui ont été pratiqués sous les premiers empereurs chrétiens, en excitant le zèle des fidèles par des marques d’honneurs, dont l’ancienne Église a bien voulu reconnaître la piété des fondateurs… i. Les dîmes, outre les oblations et les droits de l’Église, appartiendront entièrement à chacun des curés dans l’étendue de la paroisse où il est et où il sera établi perpétuel, au lieu du prêtre amovible qui la desservait auparavant. ii. Les dîmes seront levées suivant les règlements du quatrième septembre mil six cent soixante-sept. iii. Il sera au choix de chacun curé de les lever et exploiter par ses mains, ou d’en faire bail à quelques particuliers, habitants de la paroisse ; ne pourront les seigneurs de fief où est située l’église, les gentilshommes, officiers, ni les habitants en corps, en être les preneurs directement ou indirectement. iv. En cas que le prix du bail ne soit pas suffisant pour l’entretien du curé, le supplément nécessaire sera réglé par notre conseil de Québec, et sera fourni par le seigneur de fief et les habitants ; enjoignons à notre procureur général d’y tenir la main. v. Si, dans la suite du temps, il est besoin de multiplier les paroisses à cause du grand nombre des habitants, les dîmes, dans la portion qui sera distraite de l’ancien territoire qui ne compose à présent qu’une seule paroisse, appartiendront entièrement au curé de la nouvelle paroisse qui y sera fondée, avec les oblations et les droits de la dite nouvelle église ; et ne pourra le curé de l’ancienne prétendre aucune reconnaissance ni aucun dédommagement. vi. Celui qui aumônera le fonds sur lequel l’église paroissiale sera construite, et fera de plus tous les frais du bâtiment, sera patron fondateur de la dite église, présentera à la cure, vacation avenant, la première collation demeurant libre à l’ordinaire, et jouiront lui et ses héritiers en ligne directe et collatérale, en quelques degrés qu’ils soient, tant du droit de présenter que des autres droits honorifiques qui appartiennent aux patrons,