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HISTOIRE DES CANADIENS-FRANÇAIS

lèvent leurs chapeaux à tous ceux qu’ils rencontrent par les chemins… Je ne sais pas ce qu’a été autrefois le clergé catholique du Canada, mais je puis dire en toute assurance qu’aujourd’hui il se distingue par une conduite et un caractère, partout les mêmes en ce pays, parfaitement conformes à l’idée que l’on se fait de ceux qui ont mission de prêcher l’évangile. Sa vie est exemplaire ; on ne saurait guère lui reprocher de donner des avis qu’il ne suit pas lui-même. Si d’un côté le gouvernement anglais mérite des éloges pour sa conduite envers ce clergé, on peut d’autre part affirmer que celui-ci lui rend bien le service de maintenir la paix dans toute la contrée… Le nombre des catholiques comparé à celui des protestants est de dix contre un. On compte à peu près cent quatre-vingts prêtres, et douze ministres protestants… Les catholiques ne se mêlent jamais de ce qui concerne les protestants… En voyant la tranquillité qui règne ici parmi les fidèles de ces deux croyances, je ne puis m’empêcher de songer à l’Angleterre, un pays ou quinze millions de protestants refusent de rendre leurs droits à trois millions de catholiques, leurs propres compatriotes. Si les Canadiens étaient des gens intolérants tels qu’on les représente, il y a longtemps qu’ils auraient fait déguerpir tous les Anglais du Canada… Ces années dernières, les Canadiens ont commencé à manifester du penchant pour la littérature. Sous ce rapport, ils semblent vouloir rattraper le temps perdu… Le Courrier de Québec est une petite feuille, dirigée par deux ou trois jeunes écrivains qui y publient des pièces fugitives, et qui ont récemment formé un cercle littéraire[1] digne d’encouragement… La seule bibliothèque ouverte au public est celle de Québec. On y obtient des livres par voie d’abonnement… Les romans sont fort recherchés par les Canadiennes. Les seules librairies du pays se rencontrent dans les bureaux des imprimeurs, elles ne renferment à peu près que des livres d’école… La musique et le dessin sont presque inconnus au Canada. »

  1. Le docteur Jacques Labrie et autres. Proportion gardée, on s’occupait plus de littérature et on publiait plus de livres, de 1800 à 1830 qu’à présent.