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AVANT-PROPOS

Rivières ne voulurent pas suivre Papineau dans cette démarche. Si les administrateurs que l’Angleterre nous envoyait n’eussent pas été aussi intransigeants, la situation ne serait pas devenue si tendue. Papineau a eu à combattre un gouvernement odieux et il n’a peut-être pas eu tort d’y mettre une fougue parfois exaltée.

« Papineau n’était pas un utopiste, a dit ailleurs Benjamin Sulte.[1] Ce qu’il a demandé à travers sa carrière politique était parfaitement praticable. Seulement, comme tous les agitateurs, il devançait le temps, et encore, sur ce point, on ne peut pas dire qu’il allait trop vite puisqu’il est reconnu aujourd’hui que la plupart des réformes invoquées par lui auraient dû être concédées dès 1830. » Si les circonstances eussent permis à Papineau de patienter six ou sept ans encore, la prise d’armes désastreuse de 1837-38 n’aurait probablement pas été nécessaire. On peut conjecturer, cependant, que le soulèvement ne fut pas inutile. La responsabilité des patriotes aurait été moindre s’ils n’avaient pas cherché l’appui des Américains. Durant la longue période de nos luttes pour agrandir les libertés politiques du Bas-Canada nous n’avions jamais invoqué le soutien de l’étranger ni cherché à attirer les sympathies des puissances.

Le malheur de Papineau est d’avoir survécu aux vingt années (1817-37) où il fut le chef du Bas-Canada, ou, plutôt, d’être retourné en 1847 sur le terrain de la politique active sans avoir compris qu’il entrait dans un monde nouveau.[2] Il tenta, en effet, de reprendre la lutte au point où il l’avait laissée avant son exil.

  1. History of Quebec, I, 386.
  2. Ce que dit Robert Christie, History of Lower Canada, II, 330, sur ce sujet vaut qu’on s’y arrête.