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SOUS PAVILLON FRANÇAIS.

revenir bondé de visiteurs que, « par sa barbe ! » il ne voulait pas recevoir.

Le Khan traînait ses canons. Marcel alla le trouver et lui demanda chevaux et artilleurs. Il consentit à les prêter sous la réserve que M. Babin accompagnerait ses hommes, et qu’au retour, prolonge, charrettes, harnais, plumes, papiers, crayons et meubles inutiles lui seraient abandonnés. Marché conclu.

Dix jours plus tard, le Sané, que nous étions allés querir en rade de Bouchyr, venait s’embosser devant la barre de Fau et recevait dans ses flancs les trois cent vingt-sept caisses et les quarante-cinq tonnes de bagages dont le transport nous avait coûté tant de peines.

Un incident diplomatique, suscité à la dernière heure, faillit entraver le transbordement ; l’attitude loyale de Cheikh M’sel, qui rentrait triomphant à Felieh, l’énergie des officiers et des matelots français, déjouèrent les embûches dressées sous nos pas.

Nous avons acquis, au prix d’un travail opiniâtre et d’efforts dont nul ne soupçonnera jamais l’âpreté, des richesses archéologiques inestimables. Les reliques des palais achéménides ne furent pas arrachées à un monument superbe, mais ressuscitées des entrailles avares de la terre et conquises au péril de notre vie. En ma qualité d’historiographe des fouilles, il m’appartient de parler hautement et sans fausse modestie. La mission de Susiane a livré une bataille désespérée et, la Providence aidant, elle revient victorieuse.

À la générosité du roi, à ses nobles sentiments, la France doit une collection inestimable ; mais, sans l’appui constant de Cheikh M’sel, le chapiteau du palais d’Artaxerxès serait encore à Kalehè-Bender. Et qui de nous, dans l’état d’épuisement où nous ont laissés trois campagnes, pourrait se promettre de l’y aller chercher ?

Un des membres de la mission en serait pourtant capable ; seul il dort paisible et mange d’un appétit toujours frais ; seul il a la force de montrer d’impérieuses volontés : c’est Barrè bachy, nouvellement marié, gras, rond, pimpant, magnifique, charmé de courir les aventures d’un voyage de noce et d’aller, accompagné de sa belle, voir les moutons et les brebis d’Europe.

Heureuse destinée que celle de l’Agneau en chef !

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