Page:Swift - Instructions aux domestiques.djvu/12

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impartialité, avait une foi sincère, la foi qui agit, et qui passa sa vie sur la brèche à défendre l’Église anglicane, même contre ses amis politiques, soit considéré par les esprits superficiels comme un mécréant ; qu’ils traitent d’intrigant, de coureur de places, ce publiciste si influent qu’il put écrire à lord Oxford, enfermé pour crime de haute trahison dans la Tour de Londres, en lui demandant de partager sa prison, cette phrase significative : « C’est la première fois que je vous aie jamais sollicité en ma faveur, et si vous me répondez par un refus, ce sera la première requête que vous m’aurez jamais refusée » ; qu’ils traitent d’égoïste, de cœur sec et intéressé, celui qui, ayant à opter entre ce même Oxford disgracié qui s’exile et Bolingbroke triomphant qui réclame son assistance au nom de la reine et du ministère, auxquels rien ne coûtera pour reconnaître ses services, n’hésite pas à laisser la prospérité pour suivre l’infortune ; qu’ils accusent d’avarice ce vicaire de Laracor qui s’imposa de grands sacrifices d’argent pour remettre son église dans un état décent, et pour améliorer la position de ses successeurs ; ce doyen de Saint-Patrick, qui alors même que sa raison commençait à faiblir, rejeta avec indignation une demande de renouvellement de bail à des conditions avantageuses pour lui, mais préjudiciables aux doyens futurs ; cet homme qui, avec la première somme de cinq cents livres sterling qu’il put dire être à lui, institua un fonds destiné à faire, sans intérêts, de petits prêts à des artisans laborieux ; cet homme enfin, car il faut se borner, qui non seulement refusa des ministres toute rétribution pour ses travaux