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de l’esprit

calibre. Ils croïent, que le cerveau n’eſt autre choſe, qu’une grande quantité de petits animaux, armez de dents & de griffes extrémement aigues, leſquels par ce moïen s’atachent les uns aux autres, comme s’ils ne faiſoient tous enſemble qu’un ſeul & même corps ; ſemblables, à un eſſai d’abeilles qu’on découvre ſur un arbre, ou bien, à une charogne changée en vermine, qui ne laiſſe pas de conſerver ſa figure primitive. Toute invention, ſelon l’opinion de ces illuſtres, procede de la morſure de quelques-uns de ces Animalcules ſur certains nerfs capillaires, qui répandent deux de leurs petites branches dans la langue, & un troiſiéme dans la main droite[1]. Ces animaux ſont d’une Conſtitution extrémement froide : Leur nourriture eſt l’air, que nous reſpirons. Les flegmes ſont leur excrement ; & ce que nous apellons d’ordinaire Rhûme n’eſt autre choſe, qu’un cours de ventre épidemique, auquel ce petit Peuple

  1. Une des grandes parties de la Rhétorique devote, c’eſt le ſimple mouvement de la langue, & de la main droite, dirigées l’un & l’autre uniquement par le hazard.