Page:Swift - Opuscules humoristiques - Wailly - 1859.djvu/170

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gante d’avoir peur de leur ombre ; de crier en bateau par le temps le plus calme, ou dans une voiture au repos dans l’enceinte des courses ; de fuir une vache à cent pas de distance ; de tomber en pâmoison à la vue d’une araignée, d’un perce-oreille ou d’une grenouille. Du moins, si la poltronnerie est un signe de cruauté (comme on l’accorde généralement), j’ai peine à penser que ce soit une qualité assez désirable pour qu’on croie devoir y ajouter l’affectation.

Et comme les mêmes vertus siéent également aux deux sexes, il n’est pas une qualité par laquelle les femmes tâchent de se distinguer des hommes qui ne les rende pires, excepté celle de la réserve, qui toutefois, à la façon dont vous vous y prenez en général, n’est rien qu’affectation ou hypocrisie. Car de même que vous ne pouvez trop réprimer ceux de notre sexe qui se permettent d’inconvenantes libertés devant vous, ainsi vous devez être tout-à-fait sans contrainte en compagnie de personnes méritantes, lorsque vous avez une suffisante expérience de leur retenue.

Jamais il ne manque dans cette ville de femmes hardies, vantardes et bavardes, dont les talents passent auprès des fats pour de l’esprit et de la gaieté ; leur grand mérite consiste en grossières et choquantes expressions, et dans ce qu’elles appellent mettre leur homme à terre. Si quelqu’un de leur compagnie se trouve avoir une tache sur sa naissance ou sur sa personne, s’il est arrivé à sa