Page:Swift - Opuscules humoristiques - Wailly - 1859.djvu/277

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ces. J’ai lu dans certain auteur qu’Alexandre pleura de n’avoir plus de mondes à conquérir : ce qu’il n’aurait pas fait si le concours fortuit des atomes pouvait en créer ; mais c’est là une opinion qui convient mieux au vulgaire, cette hydre aux mille têtes, qu’à un homme aussi sage qu’Épicure ; la partie corrompue de sa secte ne lui emprunta que son nom, comme le singe la patte du chat pour tirer les marrons du feu.

Quoi qu’il en soit, le premier pas vers la guérison, c’est de connaître la maladie ; et bien que la vérité soit difficile à trouver parce que, comme dit le philosophe, elle vit au fond d’un puits, cependant nous n’avons pas besoin, comme des aveugles, d’aller à tâtons en plein jour. J’espère qu’il me sera permis, après tant d’hommes beaucoup plus instruits, d’apporter ma faible offrande, puisqu’un spectateur est parfois meilleur juge de la partie que celui qui la joue. Mais je ne pense pas qu’un philosophe soit obligé de donner l’explication de tous les phénomènes de la nature, ou de se noyer avec Aristote, pour n’avoir pas été capable de résoudre le flux et le reflux de la marée, à la suite de cette fatale sentence qu’il porta contre lui-même : Quia te non capio, tu capies me. En quoi il fut tout à la fois le juge et le criminel, l’accusateur et le bourreau. Socrate, d’autre part, qui disait qu’il ne savait rien, fut proclamé par l’oracle l’homme le plus sage du monde.

Mais pour mettre fin à cette digression, je crois