Page:Swift - Opuscules humoristiques - Wailly - 1859.djvu/312

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Il n’est vice ni sottise qui demande à être mené avec autant de délicatesse et de savoir-faire que la vanité ; et il n’en est pas qui, mal dirigée, fasse une plus méprisable figure.

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L’observation est la mémoire d’un vieillard.

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L’éloquence mielleuse et acérée est comme un rasoir qu’on a huilé et aiguisé.

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Les maux imaginaires deviennent bientôt réels lorsqu’on se laisse aller à y penser ; comme celui qui, dans un accès d’humeur mélancolique, voit comme une tête sur le mur ou sur la boiserie, peut, avec deux ou trois coups de crayon, la rendre tout à fait visible, et d’accord avec ce qu’il s’imaginait.

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Des hommes d’une grande capacité sont souvent très-malheureux dans le maniement des affaires publiques, parce qu’ils sont entraînés à sortir de la voie commune par la promptitude de leur imagination. Je disais cela une fois à mylord Bolingbroke, et lui faisais observer que les employés de son ministère se servaient, pour couper une feuille de papier, d’une espèce de couteau d’ivoire au tranchant émoussé, qui ne manquait jamais de couper droit pourvu qu’il fût manié par une main sûre ;