Page:Système analytique des connaissances positives de l’homme, restreintes à celles qui proviennent directement ou indirectement de l’observation.djvu/340

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De là, l'existence réelle d'une échelle relative à l'intelligence des individus de l'espèce humaine, depuis que celle‑ci est sortie de l'état sauvage ; échelle dont j'ai parlé dans mes ouvrages, et qui offre, à cet égard, une si grande disparité entre ceux qui appartiennent aux deux extrémités qu'elle présente.

A quelque degré de l'échelle qu'appartienne un individu quelconque, ce degré en est pour lui le terme supérieur ; son jugement le lui montre ainsi et ne lui laisse rien voir au‑delà. Il conçoit, à la vérité, qu'on peut l'emporter sur lui en connaissances d'objets particuliers dont il ne s'est pas occupé ; mais il ne saurait croire le jugement d'aucun autre puisse avoir quelque part plus de rectitude que le sien. Presque tout le monde ignore, en effet, que le jugement est d'autant plus imparfait, d'autant plus borné, qu'on l'a moins exercé, que l'on a moins d'idées, moins de connaissances, etc. ; en sorte que, hors du cercle des idées que l'on a pu acquérir, le jugement, sur lequel on compte néanmoins, est essentiellement sans solidité.

Le jugement est à l'esprit ce que les yeux sont au corps ; de part et d'autre, l'on ne voit, soit les objets, soit les choses, que par ces moyens ; tout paraît donc réellement tel qu'on l'aperçoit. Mais, dans tous