Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 6.djvu/499

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1680 Si, avant que de jouer, on pensoit à ce qu’on peut perdre, (et qu’il le faut payer le lendemain[1], je crois qu’on ne s’engagerait pas à de telles parties ; mais l’on s’imagine qu’on les gagnera, et voilà où souvent l’on se trompe[2]. Si Dangeau est de ce jeu, il prendra toutes les poules[3] : c’est un aigle. Il en arrivera tout ce qu’il plaira à Dieu, comme des six mille francs que je devois toucher à Nantes : il est sorti une chicane du fond de l’enfer, qui me rejette je ne sais où.

Je vois par plusieurs lettres que la vie retirée et compassée de la jeune princesse[4] n’est point dans son goût : sans la facilité de son esprit et sa complaisance extrême, cela pourroit s’appeler.contrainte ; que savons-nous encore ce qui se passe dans cette place, la plus belle de l’univers ? Celle de Danaé[5] est une autre merveille : la pluie d’or[6] est fort abondante ; nulle de ses sœurs n’approche de sa beauté, mais leurs établissements ne seront point médiocres, et n’en seront pas moins solides[7].

Mme de Mouci ne me paroît pas en chercher d’autre[8] que celui d’être la plus admirable et la plus romanesque personne du monde[9]. Ne connoissons-nous pas une princesse qui se dépêcha de marier son amant, afin

  1. 10. « On pensoit qu’on les peut perdre, et qu’il les faut payer le lendemain. » (Éditions de 1737 et de 1754.)
  2. 11. « Et voilà comme on se trompe souvent. » (Édition de 1737.) — « Et voilà souvent comme on se trompe. » (Édition de 1754.)
  3. 12. « Il gagnera toutes les poules. » (Éditions de 1737 et de 1754.)
  4. 13. La Dauphine.
  5. 14. Mme de Fontanges.
  6. 15. « Il est vrai que la pluie d’or, etc. » (Éditions de 1737 et de 1754.)
  7. 16. « Mais les établissements n’en seront pas médiocres. » (Ibidem.)
  8. 17. « Ne paroît pas en chercher d’autre. » (Édition de 1737.) — « Ne me paroît pas chercher d’autre avantage. » (Édition de 1754.)
  9. 18. Voyez la lettre du 12 juin précédent, p. 450 et 451.