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Page:Töpffer - Voyages et aventures du docteur Festus, 1840.djvu/115

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et ayant incontinent levé les yeux, ils virent la force armée et l’habit cheminant par en haut d’orient en occident. Toute la commune cria aussitôt : C’est le Maire ! et, rentrant en elle-même, se mit à le suivre, sans le perdre des yeux, ce qui était cause que faute de voir leur chemin ils trébuchaient par centaines.

C’est ainsi qu’ils coururent durant deux jours à travers champs, roulant, sautillant, boitant, culbutant, et faisant de grandes dévastations. Devant eux, fuyaient effrayées toutes les basses-cours des lieux circonvoisins, notamment trois cent trente dindons alarmés, une multitude de poulets, de cochons, de coqs d’Inde, plus une foule de moutons, cavales, génisses, plus soixante chiens de garde, dix-sept gardes-champêtres, quinze municipaux, vingt-neuf marguilliers, douze maires et leurs adjoints qui, ayant voulu les arrêter, se trouvèrent au contraire entraînés par le tourbillon ; d’où, faute de pouvoir se faire entendre, plusieurs périrent de catastrophes bilieuses, provenant d’apostrophes rentrées.

Heureusement, le Maire, le véritable Maire, que nous avons laissé en chemise dans ces parages, les aperçut de loin, et reconnut sa commune. Sur quoi, il dit aux paysans désolés qui l’entouraient : Ne bougez pas, et laissez-moi faire. Puis s’étant placé sur un tertre en face de la colonne qui arrivait, il