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Page:T. Corneille - Poèmes dramatiques, tome 1, 1748.djvu/419

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Vous-même apprenez-moi ce qu’il faut que j’en croie.

Oronte

Vous le pouvez connoître à l’éclat de ma joie.

Dorotée

J’en soupçonne l’adresse.

Oronte

Avec peu de raison.

Dorotée

Souvent un beau dehors cache une trahison.

Oronte

Pour plus de sûreté n’en croyez que vous-même,
Consulter votre cœur, il sait si je vous aime.

Dorotée

Il m’en fait donc secret.

Oronte

Moins que vous ne pensez,
Si vous daignez l’entendre il vous en dit assez ;
Et d’ailleurs ce devoir dont mon amour s’acquitte…

Dorotée

Peut-être étant forcé n’est pas de grand mérite.

Oronte

L’hommage que je rends aux yeux qui m’ont blessé
Passeroit-il chez vous pour un devoir forcé ?
Cet hommage si pur, sans mélange, sans tache,
Et qui n’a rien en soi de honteux ni de lâche ?

Dorotée

Vous l’élevez bien haut.

Oronte

N’en ai-je pas sujet
Puisque de mon amour vos vertus sont l’objet,
Qu’en vous est le motif qui fait que je vous aime,
Et que c’est seulement à cause de vous-même ?

Dorotée

Je puis donc m’assurer qu’il durera toujours,
Ce rare et digne amour qui de moi prend son cours,
Car encor que du temps le pouvoir soit extrême,
Me peut-il faire enfin cesser d’être moi-même ?