Et son cœur par l’amour vainement combattu
M’oblige en vous plaignant d’admirer sa vertu.
Vous devez davantage aux troubles de mon âme.
Votre amitié, ma sœur, a fait naître ma flamme,
Et je n’ai pu la voir si souvent avec vous,
Sans voir, sans découvrir cet éclat vif et doux,
Cette vertu modeste, et ce rare mérite
Dont le charme à l’amour secrètement invite,
Et de tant de beautés voyant l’illustre appas,
Puisque j’avois un cœur, pouvois-je n’aimer pas ?
Ainsi quelques ennuis où cet amour m’expose,
M’ayant laissé la voir, vous en êtes la cause,
Et pour moi vos bontés agiroient lâchement,
De plaindre en moi le frère, et négliger l’amant.
Voyez-la donc, ma sœur, cette fille adorable,
Montrez-lui ce respect toujours inébranlable,
Ce feu tenu secret avec que tant de soin,
Qu’il n’a souffert que vous jusqu’ici de témoin ;
Mais c’est ce qui me perd, sans ce fâcheux silence
Alonse en eut reçu l’entière confidence,
Et ne m’eût pas réduit par ces cruels avis
À mourir de douleur si je les vois suivis.
C’est lui, ma sœur, c’est lui qui propose à Dom Sanche
Cet odieux hymen où l’un et l’autre penche :
Mais si mon désespoir doit enfin éclater,
Pour mon Rival peut-être il est à redouter.
Quoi que de ses avis vous ayez à vous plaindre,
Voyez-le, cet Alonse, avant que d’en rien craindre,
Il vous cherche par tout avec empressement.
C’est à votre prière ? Avoués franchement.
Vous pourrez de lui-même apprendre le contraire.
Votre hymen prés de lui me rend injuste frère,