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Page:T. Corneille - Poèmes dramatiques, tome 2, 1748.djvu/578

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Comme sans nouvel ordre il n’y sauroit prétendre,
Dans le bois du jardin il est allé l’attendre.

HONORIUS

Zénon ne te dit rien, et veut m’entretenir ?

Stilicon

Ah, seigneur, que de maux s’offrent à prévenir !
Zénon cherche à vous perdre, et de son artifice
Mon fils trop imprudent s’est rendu le complice,
Puis qu’enfin son silence étant à redouter,
Pour fuir toute surprise il devoit l’arrêter.

EUCHERIUS

J’ai craint que cet éclat fît sur l’heure entreprendre.

HONORIUS

Quoi, jusque sur un fils ton soupçon peut descendre ?

Stilicon

Non, seigneur ; de mon sang l’exacte pureté
Ne me répond que trop de sa fidélité,
Et si pour la noircir il étoit assez lâche,
Ma main dans tout le sien en laveroit la tache ;
Mais alors qu’il s’agit d’un pareil attentat,
La plus foible imprudence est un crime d’état.
C’est hasarder ensemble et vos jours et l’empire.

HONORIUS

Tu crois donc que Zénon…

Stilicon

Oui, je crois qu’il conspire,
Et ne veut sans témoins vous voir et vous parler
Que pour prendre son temps à vous mieux immoler.
Je connois dans la cour quelles sont ses pratiques,
Et pour peu qu’au palais il ait formé d’intrigues,
Si de votre personne il nous tient éloignez,
Vos gardes par ses soins se trouveront gagnez.
Ne lui donnez point lieu de vous pouvoir surprendre.

HONORIUS

Quoi ? Sur un seul soupçon refuser de l’entendre ?

Stilicon

Non, mais comme pour vous on doit s’en prévaloir,
Faites changer la garde avant que de le voir ;