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Page:T. Corneille - Poèmes dramatiques, tome 3, 1748.djvu/380

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Scène V


Démétrius, Didas.

didas

Seigneur, sans trop d’orgueil puis-je croire le Roi,
Et se peut-il qu’un Prince et grand et magnanime
Pour le sang d’un Sujet conçoive tant d’estime,
Que d’un choix où jamais il n’auroit prétendu…

démétrius

Obéissant au Roi, j’ai fait ce que j’ai dû ;
Mais je crois qu’imitant cet effort pour un autre,
Si j’ai fait mon devoir, vous songerez au vôtre,
Et n’en croirez pas tant des vœux trop élevés,
Qu’on vous voie oublier ce que vous me devez.

didas

Le respect qui pour vous accompagne mon zèle
Ne marquera jamais une âme plus fidèle,
Et je sais trop, Seigneur, ce que vous doit ma foi…

démétrius

Puisque vous le savez, allez trouver le Roi,
Et m’épargnant l’éclat où je sais qu’on aspire,
Sauvez-moi de l’hymen qu’on lui fait me prescrire.
Je vois d’où m’en vient l’ordre, et qu’un frère jaloux
Prétend par mes refus accroître son courroux.
Sachant que j’aime ailleurs, par cette loi cruelle
Il a cru me contraindre à me montrer rebelle,
Mais j’ai lieu d’espérer que de sa haine instruit
Vous ne souffrirez pas qu’il en cueille le fruit.
Rompez donc un Accord dont l’amour qui m’engage
Par estime pour vous ne veut pas voir l’outrage,
Et respectant les traits dont mon cœur est blessé,
Chargez-vous d’un refus où je serois forcé.

didas