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Page:T. Corneille - Poèmes dramatiques, tome 3, 1748.djvu/410

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Je me rends, il mourra, sa perte est résolue.

didas

Tout autre dès longtemps l’auroit déjà conclue,
Mais comme votre cœur est moins dur que le sien,
Avant qu’en donner l’ordre, examinez-vous bien.
Qui peut craindre un remords s’apprête un sort bien rude,
Et quelque dure aux Rois que soit la servitude,
C’est à vous à juger s’il peut être permis
D’en préférer la honte à la perte d’un fils.

philippe

Non, non, il faut régner, et que l’Ingrat périsse.
Je dois au nom de Roi ce triste sacrifice,
La Nature y consent, songeons à le hâter ;
Mais nous avons toujours le Peuple à redouter.

didas

Pour forcer sa prison, s’il peut tout entreprendre,
Quand il saura sa mort vous le verrez se rendre ;
Étouffer un éclat qui seroit sans soutien.
Où l’on manque de Chef la révolte n’est rien.
Mais si de sa fureur vous craignez les menaces,
Il ne faut qu’en secret nous assurer des Places,
Tenir nos Amis prêts, les répandre en tous lieux.
Que pourront entreprendre alors les factieux ?
Étonnés par sa chute oseront-ils paroître ?

philippe

De ce Peuple insolent va donc te rendre maître,
Et t’étant assuré de la Ville et du Fort,
Viens résoudre avec moi l’ordre de cette mort.
Le poison, surprenant ce fils trop téméraire,
Avecque moins d’éclat saura nous en défaire,
Mais le temps presse, va.

didas

C’est vouloir être Roi,
Seigneur, mais…

philippe

Va, te dis-je, et ne crains rien de moi.